Annulation du voyage au Guatemala: plusieurs questions sans réponse, disent des parents

ÉDUCATION. L’annulation du voyage de fin d’année des finissants du programme d’éducation internationale (PEI) de l’école Jean-Jacques-Bertrand (JJB) a créé tout un émoi au sein de la communauté. Si la plupart des observateurs reconnaissent la pertinence d’une telle décision, plusieurs se questionnent cependant sur la façon dont les choses ont été faites.

Chaque année, les finissants du PEI effectuent un voyage culturel et humanitaire dans un pays hispanophone, en lien avec leur cours d’espagnol.

«Plusieurs étudiants de JJB ont séjourné au Pérou au fil des ans avant que l’on opte pour le Guatemala, une destination jugée plus sécuritaire», rappelle le directeur général de la Commission scolaire du Val-des-Cerfs, Éric Racine.

Cette année, 47 étudiants et quatre accompagnateurs devaient s’envoler pour le Guatemala, le jeudi 14 juin, mais ils ne sont finalement jamais partis.

«La décision d’annuler le voyage, pour des raisons de santé et de sécurité, a été prise conjointement par la Commission scolaire, l’école JJB et le comité d’accompagnement. Le grossiste en voyages a été informé de notre décision le mardi 12 juin», résume M. Racine.

Rappelons que le volcan Fuego a fait irruption une première fois le dimanche 3 juin et de nouveau le mardi 5 juin, soit quelques jours avant le départ du groupe de JJB.

«Il faut savoir que 60 % du voyage (six premiers et deux derniers jours) devait se passer dans la zone rouge, à un endroit où de nouvelles éruptions peuvent survenir à tout moment. Les cendres et les vapeurs présentes dans ce secteur sont nocives pour la santé», ajoute le DG de Val-des-Cerfs.

La CSVDC s’est occupée de l’appel d’offres et de l’octroi du contrat.

«La facture s’élevait à  près de 125 000 $, soit 2 600 $ pour chacun des 47 enfants participants. Les quatre accompagnateurs obtiennent un laissez-passer gratuit dans les voyages de groupe», explique M. Racine.

Suite à l’annulation du voyage, Val-des-Cerfs a reçu au moins deux mises en demeure l’enjoignant de rembourser certains élèves.

Déception et questionnement

Les familles concernées par l’annulation du voyage ont été invitées à soumettre une demande de remboursement à leur compagnie d’assurance dans l’espoir qu’elle accepte de les indemniser.

«Nous allons devoir nous battre pour obtenir un remboursement. On est pris dans un dédale de documents qu’il va falloir remplir et rien ne dit qu’on va obtenir gain de cause», soutient un parent, qui requiert l’anonymat.

Le DG de Val-des-Cerfs affirme de son côté que les parents ne seront pas abandonnés ou laissés à leur sort dans cette histoire.

«Il n’est évidemment pas possible de revenir en arrière, mais la Commission scolaire va tout faire pour faciliter les démarches des parents auprès des compagnies d’assurance», indique-t-il.

Pour certains parents, c’est trop peu, trop tard.

Jean Charlebois, un parent de Farnham, reconnaît que les étudiants ne pouvaient pas se rendre dans la zone rouge, mais estime que la CSVDC aurait dû contacter le grossiste en voyages pour établir un autre itinéraire.

«J’ai contacté l’agence de voyages Aqua Terra, martin matin (12 juin), et celle-ci m’a certifié n’avoir reçu aucune demande de Val-des-Cerfs pour un nouvel itinéraire. Les dirigeants de la Commission scolaire ont paniqué et n’ont pas cherché de solution», déplore-t-il.

Ce dernier laisse entendre que plusieurs parents auraient été prêts à débourser un supplément pour permettre la relocalisation de leur enfant dans une autre région du pays.

M. Charlebois ajoute que le Guatemala n’était toujours pas fermé aux touristes et que les compagnies d’aviation continuaient de desservir ce pays au moment de l’annulation du voyage.

«Le grossiste et l’agence de voyages nous ont dit que l’aéroport était ouvert», reconnaît le DG de la Commission scolaire.

Police d’assurance

Le directeur général de la CSVDC n’est pas en mesure de dire combien de parents pourraient avoir droit à un remboursement de la part de leur compagnie d’assurance.

«On demandait aux parents de nous fournir une preuve d’assurance-voyage comprenant l’assurance-bagages, l’assurance-annulation, l’assurance en cas de maladie, mais les parents pouvaient aussi prendre une clause d’annulation tous risques», indique-t-il.

Les parents consultés par L’Avenir & Des Rivières disent n’avoir jamais entendu parler d’une clause d’annulation tous risques – qui leur aurait permis d’obtenir un remboursement sans la moindre complication – lors des rencontres d’information sur les préparatifs du voyage.

Certains d’entre eux estiment par ailleurs que Val-des-Cerfs aurait eu avantage à faire preuve de plus de transparence dans ce dossier.

«Le 8 juin dernier, lors d’une rencontre d’urgence convoquée par la direction de l’école JJB, j’ai cru comprendre que le voyage était déjà annulé et d’autres personnes présentes me disent la même chose (….) Au-delà de la déception liée à l’annulation du voyage, je déplore la façon dont les informations ont été véhiculées aux parents. Ça a été fait tout croche», soutient un parent, sous le couvert de l’anonymat.

 

«ÇA FAIT CINQ ANS QU’ON EN PARLAIT» – LA PAROLE À UN ÉTUDIANT

Émile (nom fictif) a 17 ans et devait s’envoler pour le Guatemala, jeudi dernier. Il a accepté de nous parler de sa déception.

«On comprend la décision de l’école et de la Commission scolaire, car ça risquait d’être compliqué. Le pays connaît des difficultés, des gens ont dû être évacués, il n’aurait sans doute pas été facile de déplacer un groupe de 51 élèves et accompagnateurs», affirme-t-il.

Celui-ci rappelle que d’autres étudiants du programme d’éducation internationale de JJB ont eu la chance de se rendre au Guatemala au cours des dernières années et n’ont rencontré aucun problème.

«Nous avons seulement été malchanceux», analyse-t-il.

Émile rappelle que les étudiants du PEI cheminent ensemble tout au long de leur parcours au secondaire.

«On envisageait un peu ce voyage comme un trip de gang. Ça fait cinq ans que les deux classes sont en contact et on est tous des amis», précise-t-il.

Les étudiants du PEI ont également appris l’espagnol en guise de troisième langue durant leurs études secondaires et ont par ailleurs pris soin de se documenter sur le Guatemala. Plusieurs d’entre eux ont par ailleurs eu recours à des levées de fonds (vente de chocolat, de fromage, etc.) pour payer une partie du voyage. Autant d’efforts qui ne pourront être récompensés.

«Une des élèves a proposé de louer un chalet au mont Sutton afin que nous puissions nous rassembler. Plusieurs d’entre nous devraient y être, car on a tous pris congé au travail et on est disponible», nous a confié Émile, la veille de ce rassemblement improvisé.